30 Mars 2015
MARCHE CONTRE LES CANCERS DE L’ENFANT
Du Jeudi 5 au lundi 9 Mars 2015
Un parcours entre Cher et Loire, avec Mario le Mulet
Sous les couleurs de « l’étoile de Martin »
‘Espérer et grandir sans cancer’
Il est 8 heures du matin ce jeudi 5 Mars. C’est après avoir brosser énergiquement la boue collante sur les poils de Mario, puis procédé à un bâtage dans les règles de l’art que nous quittons par un temps sec et frais le pré de Basfer.
Nous passons devant chez Cayatte, puis contournons le Haut Guéret pour nous diriger vers la Clotière. Sur le chemin détrempé nous marchons avec peine, glissant sans cesse sur la terre grasse.
Deux chevaux échappés d’un pré nous suivent à distance et distraient Mario dans sa marche. Ils sont tenaces dans leur accompagnement et je ne peux m’en défaire qu’à l’approche de la Tesnière, où, ils s’en retournent vers leur parc. Tant mieux, cela devenait pénible de voyager avec eux. Je pense que ce sont les chevaux de Delphine qui ont franchi la clôture pour prendre des vacances et qui maintenant ont retrouvé leur pâture. Jusqu’au château d’eau, ce sont les vignes des coteaux de Pouillé, et en cette saison, les retardataires de la taille sont encore à l’ouvrage. Le printemps étant annoncé, il faut maintenant terminer la taille sans trop tarder! Puis, c’est la descente vers le Cher, que nous traversons à Thésée par le pont de fer. Dans le petit village, nous saluons Christophe et Daniel qui ont entendu le pas du mulet, avant de filer par les vestiges gallo-romain sur le GR 41. Mario marche d’un trop bon pas ce qui nous empêche de reconnaître Claire et Nelly qui pourtant nous hèlent sur le pas de leur porte.
Sur les hauteurs de Monthou sur Cher, dans le bas côté, nous trouvons un porte clés, jeté ici vraisemblablement par des indélicats soucieux du recyclage par la nature. Nous le déposons sur la plate forme du point-tri située non loin de là. Nous formulons alors l’espoir secret que le père Fouras, maître des clés Montholien retrouve son trousseau.
A la sortie de Monthou, nous devons choisir le chemin le plus approprié pour rejoindre Pontlevoy. Nous ouvrons la carte d’état major, celle que l’on nomme aujourd’hui carte topographique de randonnée au 1/25000. Le petit vent qui s’est levé ne facilite pas la « dépliure » et encore moins la « repliure » de cette carte. Il faut se mettre à contre vent en lui tournant le dos au risque que la carte s’envole ou se déchire. C’est là que l’on peste contre le vent qui nous embête pour finalement replier grossièrement ce grand morceau de papier dans la poche du blouson.
Avez-vous déjà utilisé une carte par grand vent ? Alors, vous voyez bien de quoi je parle, hein ?
Le mieux est de « stabiloter » avant le départ l’itinéraire que l’on compte emprunter ; cela facilite la lecture rapide.
Un très beau chemin m’a conduit jusqu’à l’abbaye de Pontlevoy ; oui, un beau chemin mi- boisé mi-herbeux.
Il était sur le coup de midi lorsque nous sommes arrivés dans le village. Devant le café « le Commerce » un voisin a proposé de l’eau à Mario et du coup, je suis entré dans l’estaminet pour m’y restaurer. Au motif de notre périple muletier (marche contre les cancers des enfants), le patron m’a offert le couvert. Le repas vite avalé, en jetant de temps en temps un œil sur le mulet resté au dehors, fut des plus sympathiques, les clients faisant preuve d’une grande gentillesse et d’un intérêt certain pour notre démarche.
Les différents journaux locaux ainsi que les radios ont fait large presse sur notre équipée. Grâce à ces annonces, les gens vont vers nous, et entretiennent la tirelire accrochée au poitrail de Mario. La pédicure sort de son cabinet et me propose un arrêt dans sa cour, la buraliste m’invite à boire un café, une jeune désœuvrée fait des câlins à n’en plus finir au mulet qui trouve cela plaisant, une maman de 3 enfants en bas âge s’apitoie sur le sort de ce malheureux mulet, met quelques pièces dans la cagnotte pendant que les marmots morveux lui donnent des croutons de pain à gogo.
Tout le long de ce bref parcours en Loir-et-Cher, j’ai été surpris par la générosité des personnes rencontrées et cela malgré leurs conditions et leurs difficultés financières. Ce ne sont pas les personnes les plus aisées qui mettent la main à la poche.
Ainsi, près de Blois sur la rive droite de la Loire, je longeais une bien belle propriété, genre manoir XVII°. M’apercevant devant son porche, alors qu’elle sortait sa voiture, la propriétaire m’interroge :
- Quel bel animal ! quelle belle promenade faites-vous ?
- Heu ! Ben, c’est que je ne suis pas en promenade, je marche pour soutenir la recherche…
- C’est tout bonnement formidable, c’est absolument génial ! c’est sublimissime ! Que peut-on faire pour vous ?
- Vous pouvez pour soutenir cette action mettre des sous dans la tirelire que voici, ou bien participer en faisant Un chèque à l’ordre de l’association. Cela est déductible de l’impôt sur le revenu.
- Comme c’est dommage, je n’ai pas de monnaie sur moi et mon carnet de chèques est dans la maison.
Nous avons continué notre chemin.
Sacré Mario.
Par deux fois, nous avons reçu l’hospitalité du châtelain de Saint Gervais la Forêt. Un superbe gîte pour le muletier, et un box bien moelleux de paille et pourvu abondamment en foin pour Mario. Habitué à vivre libre dans son grand pré de Basfer, l’olibrius se sentant un peu à l’étroit s’est gratté l’encolure sur la porte de l’écurie faisant voler celle-ci en éclat.
- Monsieur Mario ! C’est très gênant de recevoir l’hospitalité et de déglinguer une porte en guise de remerciement !
Je proposais aussitôt au châtelain de revenir réparer celle-ci. Il déclina derechef mon assistance en me disant qu’il en ferait son affaire.
Pour sécuriser l’ouverture béante, je mis en place la clôture électrique afin que le mulet ne tente point de prendre le large.
Au cours d’un voyage avec le mulet, il y a toujours une ou plusieurs anecdotes à se rappeler.
Ainsi, pendant que je me restaurais dans un bistro des bords de Loire, j’attachais Mario à la
lice de protection en bordure du trottoir. Celui ci a l’habitude de ces moments de repos sur les coups de midi et il attend sagement sur trois pieds que la balade reprenne. Sauf que…sauf qu’une brave dame qui aime beaucoup les bêtes, vient s’émouvoir sur notre Mario, le trouve bien malheureux et s’approche auprès du mulet pour lui faire des bisous sur sa tête. C’est là que tout a failli mal finir, car Mario lui rendit son bisou par un énergique coup de tête. La pauvre dame confuse et traumatisée par la violence du choc reçu sur sa tempe s’en retourna s’asseoir à sa table en se tenant la tête à deux mains. Comme dans la fable du Corbeau et du Renard, elle jura mais un peu tard qu’on ne l’y prendrait plus. Mario n’est pas une peluche !
Durant toute la longue matinée du samedi 7 mars, j’ai accompagné Mario au marché de Blois, place Louis XII. Il est resté quasi immobile pendant trois bonnes heures, coincé entre un marchand de saucisson (pur porc) et une devanture de lingerie féminine, petits et gros bonnets en tout genre. Il a fait la joie des enfants et de tous les chalands ; mais quel embarras que de préserver la sécurité des passants insouciants et de leurs marmots qui veulent toucher le mulet sur tous les côtés, en pensant que ce gros âne n’est en fait qu’une peluche gagnée à la foire à neuneu. J’ai compris la folie d’être en exposition statique SEUL avec un grand mulet au milieu d’une foule de promeneurs qui s’intéressent à la fois aux messages affichés par les calicots et à Mario, l’exceptionnel et rare mulet. La conclusion de cette opération fut néanmoins très positive puisqu’elle permit de récolter dans la tirelire en aluminium quelques 2,5kg de monnaie soit environ 550 euros qui seront reversés à l’association Etoile de Martin.
Au pied de la statue équestre de Louis XII, nos affaires ont failli mal tourner. Pendant qu’une brave dame m’expliquait que le sculpteur avait commis une grossière erreur en croquant le cheval du roi : le pied postérieur gauche et celui de l’antérieur gauche sont levés simultanément. De son point de vue, cela est impossible et….
Pendant cette leçon de théorie équestre, avisant un anneau sur le côté du porche du château, j’y attache Mario sans prendre garde qu’à côté de celui-ci se trouve un autre anneau en forme de queue de cochon
. Comme à l’accoutumée, Mario profite de la halte pour se gratter le haut du museau à l’endroit des apophyses zygomatiques. Patatras, le voilà qui tire au renard, il s’affole : pensez donc, son licol et l’hackamore sont pris dans la queue de cochon et Mario se trouve ainsi prisonnier. Pour se délivrer, il donne de grands coups de tête en faisant exploser les cuirs. Pendant ce temps, la dame pompier de service rigole béatement en voyant le mulet ainsi libéré, et les touristes asiatiques trouvent le spectacle à leur goût et photogénique.
Avec des bouts de ficelles de batteuse et de fils électriques bleus de diamètre 1.5, j’effectue rapidement une réparation de fortune en rassurant le mulet, puis je me rends au milieu de la place pour la photo souvenir.
Là, je retrouve la brave dame qui ne savait pas qu’un cheval peut marcher en amblant : surtout un cheval de roi !
Puis, par magie, arrive Nicolas le journaliste de « plus FM » qui en profite pour capter une petite interview muletière.
Durant cette courte marche de 170 km, nous avons souvent emprunté le chemin de pays (GR) baptisé « entre Loire et Cher, de châteaux en châteaux ». En passant près du château féodal de Fougères, nous avons fait halte chez Betty où nous avons encore reçu une hospitalité chaleureuse
Ce fut un beau voyage, un « dégommage » de printemps, une mise en harmonie, mais surtout un sourire à la vie donné pour les gosses de Gustave Roussy, du CHU de Nantes et d’ailleurs.
Merci à Mario superbe témoignage de patrimoine vivant.
Merci à tous ceux qui nous ont soutenus durant ce voyage.
Jean, à la fin Mars 2015