RANDO MULET

Récits de voyages et randonnées diverses avec un mulet:UN VRAI MULET

En passant par la Vendée et les Charentes avec ses sabots 9 ----"En route vers Rochefort" "Presque, la corderie royale"..

Chapitre IX

Résumé de l'épisode précédent: Dépannage de la BMW, on a flâné sur la plage puis avons été reçu à l'ESAT de Yves. Avec la lagagne aux yeux j'étais d'humeur maussade!

En l'absence de pont, la ville s'est développée sur une seule rive

 

En route vers

Rochefort.

Le chemin qui me descend vers Rochefort jouxte la 2 X 2 voies qui vient de La Rochelle. Nous sommes si proche que nous recevons les embruns projetés par les autos mais surtout par les poids lourds extrêmement nombreux qui circulent sur la double voie. Les projections d’eau nous cinglent le visage et le museau et je ne peux maintenir mon chapeau qui s’envole à plusieurs reprises. De plus, le bruit conjugué des moteurs et des pneus sur la chaussée mouillée est violent et continuel : à croire que la poisse, la guigne me poursuivent sur ce trajet qui me conduit vers la ville de l’Hermione.

Loin devant moi, sur la grande ligne droite, près du Bois Maché et des Gagneries, je crois apercevoir au travers des embruns une forme qui se déplace dans ma direction. C’est en fait un vélo tractant une petite remorque, un fanion noir, jaune et rouge flotte au vent.

Nous arrêtons nos montures pour "tailler une bavette"( comme on dit) et tête-bêche sous les rafales nous parlons de rien et pourtant l’homme me semble triste et préoccupé. Il se nomme Miguel et rejoint la Belgique après avoir fait un grand voyage à travers l’Europe du sud en mémoire de sa femme et sa fille tuées lors d’un accident de voiture. Cycliste au long cours il me dit qu’il vient de faire halte à Rochefort pour se restaurer et qu’il n’a plus un sous vaillant car s’étant arrêté devant l’office de tourisme pour se renseigner sur les curiosités à découvrir, il s’est fait voler son sac à dos laissé sur son porte bagages. « Je n’ai plus rien, ni passeport, ni papiers, ni carte de paiement...je ne sais comment manger ce soir, je vais essayer de joindre le consul, s’il en existe à La Rochelle... » Tout ce qu’il me raconte est si gros qu’aucun d’entre vous n’y aurait cru, mais le type a l’air si désorienté et sincère, que bien évidemment je suis troublé. Que croyez vous qu’il advint? Je ne sais pas encore pourquoi mais je me suis laissé attendrir et lui ai confié un billet de subsistance! Et puis, nous sommes repartis chacun de notre côté sous une pluie qui redoublait de plus belle.

Là, je n'ai pas de photos de mon cycliste mi-belge mi-espagnol: la pluie ne m'ayant pas autorisé à saisir l'instant. Seul le temps mauvais s'est inscrit sur mon téléphone.


 

Presque, la corderie royale.

En causant avec des gens du coin je viens d'apprendre la probable impossibilité pour Mario d'utiliser le pont transbordeur. Pour rejoindre mon étape de Pillay à Echillais de l'autre côté du fleuve, il fallait donc me hâter, car 13 km de détour allaient sérieusement « impacter » (comme on dit aujourd’hui) mon heure d’arrivée. Moi, qui comptait m’arrêter à la corderie royale, je suis marron comme un YAB des hauts. Pourtant ce monument aujourd’hui réhabilité mérite le détour ne serait-ce par sa dimension: 370 m de long. J’aurais aimé mieux comprendre la fabrication des cordages des navires à voiles.

Je me suis documenté depuis auprès de mon ami Lucien, un Nantais, ancien de la navale, pour compenser cette déplorable absence de visite. « Sais-tu par exemple que les navires de guerre les plus importants de l’époque nécessitaient jusqu’à 100 km de cordages. » me disait-il à la façon de l’oncle Paul, en tirant sur sa pipe?

« A l’époque, le cordage le plus long d'un navire mesurait une encablure (soit environ 195 m). Or celui-ci devait être réalisé d'un seul tenant afin d'être le plus solide possible. Le cordage est réalisé en réunissant plusieurs brins par torsion et cela réduit bien évidemment sa longueur d’un tiers, ce qui explique la grande dimension du bâtiment. »

Je suis fier d’avoir appris la distance d’une encablure... et  je suis maintenant benaize (mais pas pour longtemps) comme on dit dans les Charentes et le sud-ouest.

-Les histoires de l’oncle Paul: Bd de J-Michel Charlier publiées autour des années 60 dans Le journal Spirou.

________________________________________________________________________________________

En ce moment nous faisons les marchés pour présenter le livre "Au pas du mulet" et faire sa promotion: hier, nous étions à Contres sous la pluie, aujourd’hui nous sommes à Saint Aignan et demain nous serons à Noyers-sur-Cher. Cet exercice me permet de rencontrer des gens qui ne me connaissent pas mais qui sont de fervents admirateurs de Mario. D'ailleurs, c'est assez étrange car cette relation quasi fusionnelle avec ce mulet de leur coin se caractérise souvent par des caresses et des bisous bien sûr mais aussi quelquefois par des confidences très personnelles exprimées à voix basse.

Heureusement  que la gente mulassière perdure encore un peu (si peu) dans notre France pour se substituer, au café du coin, au curé, à l'instituteur ou aux très chers amis facebookiens! Le tout est de savoir qui soigne l'autre?

Vive le mulet, analyste silencieux et sans divan qui écoute, feint de comprendre et réconforte l'humain qui a du vague à l'âme!

Jean, depuis Thésée en Loir-et-Cher en Avril 2023.

Prochain chapitre: Le pont transbordeur de Rochefort puis nous ferons connaissance avec Tonnay-Charente.

_________________________________________________
 

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article